Quand, semaine après semaine, on vient donner son avis éclairé sur ce qui se passe dans le monde – et parfois dans le Monde -, on s’expose à quelques menus risques. D’abord, celui d’avoir des lecteurs pas d’accord. C’est moche mais c’est comme ça, on a beau savoir qu’on est subtilement rationnel, tranquillement impartial, honnêtement humaniste, on va toujours trouver un pisse-froid réac ou une exaltée gauchiste pour hurler au scandale. Parfois plus d’un. Souvent d’ailleurs. C’est bien du malheur, car on a passé un certain temps à polir notre belle chronique, notre joli édito, et paf !, l’aigrie – de Toul – de service ou l’énervé de fonction se jette sur vous, votre papier, votre famille, votre Rédac’Chef et exige un droit de réponse, une correction générale ou un duel à l’aube. L’avantage, c’est qu’en fait, comme on sait que ça fait partie du jeu, on met dans sa poche, avec son mouchoir par-dessus et on passe à la chronique suivante en s’en tamponnant le coquillard.
Le deuxième risque, c’est que notre belle analyse soit un parfait tissu de conneries en acier trempé. On est en train d’expliquer, dimanche, que Macron est unanimement haï par le Peuple, un sondage paraît lundi, mardi on l’analyse et mercredi il apparaît que Jupiter est adulé par les cols bleus de 35 à 67 ans ayant un sourcil droit plus épais que le gauche, bref on a tout faux et pour s’en sortir, une solution, on ignore. Je me rappelle avec gourmandise d’une émission sur Canal, à l’époque du Grand Journal, émission du vendredi où de fins analystes venaient causer dans le poste et avertir les téléspectateurs de l’avenir. Le matin même, Ben Ali s’était tiré de Tunisie et l’Égypte était en pleine révolution. Mais le docte Christophe Barbier et son écharpe rouge de compèt’ annonçaient qu’attention, on allait voir ce qu’on allait voir, Moubarak n’était pas le picrocholin dictateur tunisien et qu’il n’était pas prêt de dégager. Le seul petit problème, c’est que sûrement pour des raisons de weekend en Normandie, la sympathique émission avait été enregistrée en début d’après-midi et diffusée à 19h00. Heure à laquelle Moubarak s’était carapaté sans demander son reste et que son régime était aux poubelles de l’Histoire. Un triste bandeau défilait au bas de l’écran pour expliquer cela et depuis, quand l’actu me rattrape, je ricane en pensant à Barbier et à son assurance malvenue.
Le troisième risque est d’être rattrapé par l’actualité. Tiens, moi, par exemple, la semaine passée, je me moquais de la présence du drapeau palestinien dans les manifestations de la Gauche de la Gauche de la Gauche de Mes Deux et paf, incidents à la frontière avec Gaza, 60 morts. Évidemment, d’aucuns me reprochent le mardi mon manque d’humanité envers le Peuple Qui Souffre aka les Palestiniens. Certes, j’ai écrit ce papier dimanche, corrigé le lundi, publié le mardi. Et la situation à Gaza est arrivée. Mais, têtu comme une mule bornée, je ne change rien à mes propos de la semaine dernière et pire, je les assume et les reprends. Car ce n’est pas au nombre de morts que se résout un conflit de nationalités, à moins d’être aussi con que Hamon qui regrette qu’il n’y ait pas de mort du côté israélien. Ce n’est pas un match de foot, bordel, c’est une question de droit international pour les uns et de sécurité nationale pour les autres. Mais dès qu’il s’agit de la Palestine, toutes les bonnes âmes perdent leur rationalité. Je ne vais pas expliquer ici que sur 60 morts, 50 étaient membres – c’est-à-dire combattants – du Hamas, que le Jihad Islamique en revendique 3 ou 4, bref que les gentils manifestants pacifiques ont une tout autre gueule que celle que la doxa médiatique veut leur donner. De même que je ne vais pas m’alarmer ici du manque de vista de la part des dirigeants israéliens qui méconnaissent volontairement les rapports de leurs propres services de renseignements et restent sur des schémas dépassés depuis 20 ans, c’est un air connu. Mais je dis et je maintiens qu’il y a bien deux poids et deux mesures au Moyen Orient, mais que, contrairement à l’antienne habituelle, ce n’est pas pour le bien d’Israël mais contre ce pays que cette dichotomie est utilisée. Un mort est un mort partout dans le monde. Un mort palestinien est un mort en Syrie ou au Liban. Un mort palestinien tombé sous les balles israéliennes est un crime atroce contre l’Humanité. Et ce n’est pas discutable.
Étonnant, non ?, comme disait l’autre.
Pour ma part, je vais continuer à écrire mes chroniques le dimanche, faut bien que je m’occupe depuis que Jacques Martin a quitté la télé.
par Naqdimon Weil
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