Quelle époque formidable

par | 1 Avr 2025

Cela fait maintenant quelque temps que l’air du temps a cet aigre parfum d’une fin du monde qui s’apprête à nous exploser gentiment à la gueule. Même les plus optimistes d’entre nous flirtent avec la dépression nerveuse, et la tendance générale pourrait se résumer à un « si ça continue, ça ne va pas durer » propre aux époques où la boussole n’indique plus le Nord mais un seau de merde à proximité.

Bien sûr notre époque doit être moins angoissante qu’elle ne le fut dans les années 30 du siècle dernier où Mussolini, Hitler, Franco et Staline faisaient la pluie et les autans en Europe. D’ailleurs, n’importe quelles années 30 de n’importe quel siècle ne furent heureuses que pour ceux qui ne les ont pas vécues. Chers lecteurs, mes semblables, prenons du recul et rappelons-nous Stefan Zweig racontant la douce adolescence de Montaigne :
« Il est encore presque un enfant, 15 ans à peine, quand, à Bordeaux, la révolte populaire contre la gabelle, l’impôt sur le sel, est réprimée sous ses yeux avec une inhumanité qui fera de lui, pour le restant de sa vie, l’adversaire acharné de toute cruauté. L’adolescent voit des centaines d’hommes se faire torturer à mort, pendre, empaler, écarteler, décapiter, brûler. Il voit les corbeaux survoler pendant des jours le lieu de l’exécution pour se nourrir de la chair calcinée et à demi putréfiée des victimes. Il entend les cris des suppliciés et est contraint de respirer l’odeur de chair brûlée nichée dans les ruelles (…) »

Alors oui, certes, je ne vous le fais pas dire, néanmoins et nonobstant… il y a Trump et Musk, Poutine, les islamistes au pouvoir ou sur le qui-vive de Dakar à Djakarta ; il y a la Chine, Erdogan, Boualem Sansal dans les geôles algériennes, Netanyahou qui souhaite faire découvrir les joies d’une dictature aux Israéliens, Maduro au Venezuela et Javier Milei en Argentine…
Bref, il y a tellement de salopards à la tête de tellement de pays que – soyons sérieux – ça va chier d’une telle force qu’on en est à se questionner pour savoir si les enfants de nos enfants (en plus du gluten, des fraises et du lactose) ne vont pas développer de sévères allergies au nucléaire lorsque la Seconde Guerre mondiale se renommera la Deuxième Guerre mondiale parce que la Troisième viendra d’éclater ?

En attendant, chez nous, un parti dit de gauche joue avec la haine des Juifs comme si l’antisémitisme n’était qu’un détail de l’histoire de l’humanité, tandis que l’extrême droite (entre deux inéligibilités) attend patiemment que la lâcheté, la peur, la démagogie et la post-vérité la propulsent à l’Élysée ;
une humoriste, Blanche Gardin, sans le moindre savoir-vivre pour ses aînés, lance une OPA hostile afin de siphonner le public de Dieudonné.
Un vieux monsieur, dans un village paumé, trouve une centaine d’hommes dans les environs pour violer sa femme quand elle ronfle ;
TikTok et Instagram sont devenus les principales sources d’information de cette merveilleuse jeunesse censée nous amener vers le « monde d’après » ;
Sur les réseaux sociaux, l’émoji dynamite veut dire que vous haïssez les femmes, la pizza que vous violez des gosses, et la pilule rouge que vous êtes un blaireau adepte des théories du complot.

Mais il y a un « mais » ! Heureusement, une note d’espoir touche notre beau pays au climat doux et tempéré malgré ce petit réchauffement climatique qui nous enquiquine la vie : C’EST LE PRINTEMPS, et nous venons de passer à l’heure d’été !
Enfin, on va pouvoir prendre un petit apéro en tenue légère, ouvert aux amours de passage, insouciants et débonnaires, assis en terrasse des cafés.
Ça n’arrive qu’une fois par an, profitons-en tant qu’il en est encore temps.

Par Anthony Casanova

Par Anthony Casanova

Anthony Casanova est le directeur de publication et le rédacteur en chef du journal satirique Le Coq des Bruyères.
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