Sur les rails de 2022

par | 21 Jan 2020

Anthony CASANOVA est politiquement correct

La campagne pour les élections municipales débutant à peine, Marine Le Pen en a déjà profité pour lancer sa campagne présidentielle. Bien que sa candidature ne soit pas une surprise, en se positionnant dès à présent comme la première tête d’affiche des présidentielles, elle souhaite faire des futures mairies aux mains du Rassemblement National: le signe avant-coureur de son succès en 2022.

Il y a 20 ans, la victoire hypothétique de l’extrême droite à la course à l’Elysée n’était qu’une histoire que l’on se racontait pour se faire peur avant les élections. La qualification de Jean-Marie le Pen au second tour des élections présidentielles de 2002 démontra que le cauchemar avait, malgré tout, un fond de réalité. En 2002, le «coup de tonnerre» provoqua un sursaut démocratique qui laissa l’extrême droite à moins de 18%. Il aura fallu attendre 3 élections présidentielles pour retrouver l’extrême droite au second tour mais, cette fois-ci, le «coup de tonnerre» n’étant plus qu’une simple averse, l’extrême droite fit 33,90% soit 10.638.475 voix.

Aujourd’hui, la gauche ne veut plus dire qu’elle est de gauche; la droite n’ose plus dire qu’elle est de droite; les extrêmes s’affirment être la «vraie droite» ou la «vraie gauche»; et Macron, ou le Rien qui voulait être Tout, s’est fait élire entre le «ni de droite ni de gauche» et le «de gauche et de droite». Ainsi, à force de ne jamais assumer qui l’on est, de s’inscrire hors de l’histoire des courants politiques, de n’être que dans des louvoiements masquant mal l’opportunisme, on se retrouve dans une société sans désir, sans utopie, sans idéal, sans horizon où les populistes ont le vent en poupe.

Puisque ni la gauche ni la droite n’ont entamé de restructuration, et que LaREM est un ramassis de déçus de droite et de gauche qui ne savent que décevoir, comment allons-nous bien pouvoir tenter l’amorce d’un barrage contre l’extrême droite aux prochaines élections? Qui sera là, qui sera encore là pour dire: «tout sauf Le Pen et compagnie»? Qui réussira encore à faire de son propre vote contre l’extrême droite le seul et unique bouclier que nous offre (pour l’instant) la démocratie afin d’éviter les dérives totalitaires?

Celles et ceux qui clament: «La prochaine fois ce sera sans moi. Si les gens veulent Le Pen, eh bien qu’elle gagne, et ils verront à quel point ils ont eu tort» sont des salauds. Mais d’où vient cette mentalité de sadique de gouttière qui souhaite que la société prenne une bonne fessée pour lui apprendre la politesse? Eh! les cons, votre suffisance, votre hautaineté de vierge effarouchée, votre éthique à la va-comme-je-t’écrase, elle ne vous pèse pas un peu au niveau des chevilles? Ça ne vous dérange pas de pousser tout le monde à l’abattoir histoire de satisfaire votre orgueil de merde?

Est-ce que tout le monde -des responsables politiques aux citoyens- se dit que la victoire de l’extrême droite serait le déclic idéal pour reconstruire enfin un monde comme il faut? Vous trouvez ça vraiment rassurant de penser: «ça ne sera pas pire qu’avec bidule ou machin»?
C’est effarant de s’imaginer à ce point au-dessus des autres pour rêver que «les gens» prennent une leçon comme si nous ne faisions pas partie «des gens». Méprise-t-on à ce point la démocratie pour que l’on finisse par ne plus vouloir utiliser notre vote comme un pavé à ajouter contre l’extrême droite? Laisserons-nous les clés de nos libertés par excès d’orgueil?
Celles et ceux qui décident de ne plus voter contre l’extrême droite c’est simplement par oubli de ce qu’est l’extrême droite. Si même vous, ô lumière de la pureté intellectuelle, décidez que l’extrême droite au pouvoir ce n’est plus un problème: comment voulez-vous que nous, les gueux, on s’en souviennent?

Par Anthony Casanova

Par Anthony Casanova

Anthony Casanova est le directeur de publication et le rédacteur en chef du journal satirique Le Coq des Bruyères.
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