Toits de zinc de Paris, fête vinicole en Arbois, baguette de pain : la ministre de la Culture a tranché, on a appris tout récemment que la France a choisi de présenter la candidature de la « pas trop cuite, s’il vous plaît, non pas celle-là, l’autre derrière, oui celle-ci, ah non finalement je préfère la première, vous pouvez me la couper ? » à l’inscription au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.
Pauvre Roselyne, quelques jours de réclusion salvatrice sur un lit d’hôpital ne lui auront pas permis d’oublier que fièvre ou pas fièvre, elle avait du pain sur la planche, à défaut de pouvoir contenter les « non essentiels » qui voudraient y remonter.
Si ce choix ravira les tartineurs, les sauceurs, les amoureux, leurs mies, les plus jeunes et les vieux croutons, il risque d’apporter de l’eau au moulin des stéréotypes, et d’offrir encore une fois au monde cette image éternelle du français, qui, béret sur la tête et journal négligemment tenu entre pouce et index, traverse gaiement le Pont des Arts une baguette sous le bras, alors même qu’à part Woody Allen, tout le monde sait qu’on n’y trouve aucune boulangerie des kilomètres à la ronde.
Cette habitude alimentaire indispensable à notre quotidien va donc potentiellement rejoindre la liste des traditions et des expressions vivantes héritées de nos ancêtres et transmises à nos descendants, inscrites pour l’éternité à l’UNESCO.
Ce recensement mondial permet notamment de découvrir les spécificités festives de chaque pays : la bière en Belgique, le flamenco en Espagne, la copeira au Brésil, et « l’idée et la pratique d’intérêts communs organisés en coopérative » (sic) en Allemagne, qui n’est pas la dernière pour la déconne.
On y découvre aussi consacrés la culture du sauna en Finlande ou l’art de la pizza à Naples, mais on y regrette l’absence notable des « serveurs de brasserie qui font la gueule à Paris » ou celle des « filles en minijupes qui vomissent à 2 heures du matin » à Londres. On y apprend aussi l’existence de « l’union pipe », qui n’est pas une tradition orale héritée de Zahia à Clairefontaine, mais une pratique ancestrale de la cornemuse à Dublin.
Mais encore :
– en Pologne : La culture apicole dans les arbres, sans oublier la culture de la picole dans les bars ;
– au Mexique : la cherreria, à ne pas confondre avec la charia au Pakistan, qui est également un jeu sportif, mais beaucoup moins ludique ;
– à Oman, le patrimoine festif associés aux dromadaires, ce qui prouve que ça bosse à l’UNESCO ;
– en Bosnie Herzégovine, la tradition du concours de fauchage d’herbe (et on se demande si le jury ne l’a pas plutôt fumée) ;
– En France, on trouve également la culture du cresson à Méréville, à ne pas confondre avec la culture d’Edith Cresson à l’Elysée ;
– en Autriche, Grèce et Italie : « La transhumance, déplacement saisonnier de troupeaux le long des routes migratoires en Méditerranée et dans les Alpes ». Pour l’année prochaine, proposons également la France, pour la transhumance des parisiens vers leurs maisons de campagne dès les annonces de confinement.
Mais aussi les fêtes vinicoles, en Arbois et ailleurs, pour soutenir nos viticulteurs durement touchés ces temps-ci, et pouvoir trinquer à leur santé et à celle que l’on aura tous, je l’espère, retrouvée.
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