5 ans de solitude

par | 7 Jan 2020

Anthony CASANOVA est politiquement correct

 

Il y a 5 ans, le 7 janvier 2015, débutait une série d’attentats qui commencèrent au sein de la rédaction du journal Charlie Hebdo pour se terminer dans un Hyper Cacher. Après ces jours d’horreur, il y eut un moment d’espoir, un bref instant de résistance lorsque le 11 janvier, dans toute la France et dans quelques endroits du monde, des millions de personnes manifestaient derrière le slogan «je suis Charlie». Et pour reprendre un vers de Georges Brassens, en ce 11 janvier 2015, «l’espérance cessa d’être désespérée». Mais sans doute, durant l’histoire du monde, maintes fois, en manifestant, en se révoltant, des femmes et des hommes ont pensé: «après ça, tout doit changer» avant d’être irrémédiablement désillusionnés. Nous espérions un vent de liberté et un sursaut de conscience mais il n’y eut que lâcheté, médiocrité et renoncement.

«Ils ont tué des dessinateurs, vive le dessin» disait-on… mais aucun média n’a crû bon d’engager des dessinateurs. Pire, The New York Times, qui déjà n’avait pas osé publier la Une de Charlie après les attentats, a pris la décision de supprimer le dessin de presse de son journal.
«Ils ont voulu tuer Charlie Hebdo, vive Charlie» disait-on… mais la rédaction vit toujours dans un bunker sous protection policière et, à chaque nouveau dessin, Charlie continue inlassablement de recevoir des menaces de mort.
«L’attentat contre l’Hyper Cacher est un crime antisémite» disait-on (rarement)… aujourd’hui on tue encore des Juifs parce qu’ils sont Juifs mais si l’on a fumé un petit joint avant le meurtre ce n’est pas de l’antisémitisme c’est simplement un effet secondaire du THC.
«Je suis Charlie» disait-on… puis, au fur et à mesure, tout le monde a trouvé sa petite excuse pour ne plus l’être. Un dessin, une chronique, une idée, tout est une provocation pour les cons. Et chez ces cons-là, si on aime pleurer les morts c’est pour mieux vomir les vivants.

Celles et ceux qui furent meurtris à vie le 7 janvier 2015, celles et ceux qui ne regardent pas un numéro de Charlie en kiosque avec mépris gardent aux tripes une colère qui n’est pas près de s’estomper. Une rage, en forme de boussole, qui vous ferait préférer crever plutôt que d’être en compagnie de celles et ceux qui -peu importe les raisons- ont conclu: «je ne suis pas ou plus Charlie».
Cette haine est une amie précieuse bien qu’elle pousse à une certaine solitude. Mais ce n’est pas grave, bien au contraire, car en dépit de ce qu’écrivait Paul Valéry, en étant seul on est toujours en bonne compagnie.
Bref, je souhaite une belle année à celles et ceux qui étaient, sont et resteront encore Charlie, les autres… qu’ils aillent bouffer leur merde.

Par Anthony Casanova

Par Anthony Casanova

Anthony Casanova est le directeur de publication et le rédacteur en chef du journal satirique Le Coq des Bruyères.
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