Covid-19, l’interview!

par | 19 Mai 2020

NAQDIMON fait son malin

Cher Monsieur 19, merci tout d’abord d’avoir accepté de réserver votre première interview en français au Coq des Bruyères, nous en sommes très fiers !

Bah, c’est normal, je vous lis chaque semaine, depuis que j’ai arrêté mon abonnement à Piscou Magazine. Et puis, appelez-moi Covid, ce sera plus sympa, vous trouvez pas ?

Mais si, absolument. Alors, cher Covid, et sans vouloir paraître insultant, quelle réussite pour vous, en à peine six mois, tout le monde ne parle que de vous, vous avez imposé votre rythme à toute l’économie mondiale, c’est un véritable triomphe ! Comment expliquez-vous cet immense succès ?

Ben, c’est surtout que j’l’explique pas du tout, moi. J’suis content, hein, c’est sûr, parce que quand, comme moi, on vient d’un patelin pas trop connu, hein, faut pas croire, Wuhan, c’est p’t-être pas le trou du cul du monde, mais c’est le poil à côté, même pas la capitale de la Chine, tout juste de la province, c’est quoi, la septième ville du pays et pis pas avec une belle réputation culturelle et tout et tout. Nan, c’est rien qu’un trou avec des ouvriers et des usines, et voilà, je débarque là, même pas certain de faire une petite tournée des hostos et des maisons de vieux de la banlieue, et paf, le succès, immédiat ! Ça surprend, faut reconnaître…

Et cette réussite, vous la vivez comment ?

C’est dur, surtout pour un gars simple comme moi. Faut comprendre, chez les virus, j’suis pas du genre le machin compliqué avec des tas de couches et de bidules difficiles, nan, moi, c’est rien qu’une quinzaine de gènes, je cherche pas à frimer, hein, c’est pas le genre de la maison, mais tout de même, c’est pas mal, pour un gars qu’a pas été aux écoles… Alors, ouais, c’est vrai, des fois, je me la pète un peu, mais c’est pas d’ma faute, aussi, quoi, quand y a tout le monde qui parle de moi, du Président des US jusqu’à Raoult, ça fait quelque chose, j’aurais aimé que mon papy y voit ça, il aurait été fier !

Votre papy ?

Oui, mon papy, mon aïeul, quoi, le SRAS de 2003, il avait essayé de lancer le bizness lui aussi, mais bon, à l’époque, le public était pas prêt, les gens ont pas suivi, j’peux pas dire qu’c’était une grosse réussite. Je dis pas, attention, il a fait c’qu’il a pu, hein, mais c’est resté un peu confidentiel.

Alors que vous…

Voilà, exactement, alors que moi, c’est parti comme un pet sur une toile cirée, oh, pardon, comme une flèche j’voulais dire, tout le monde s’y est mis et voilà, maintenant, j’suis plus connu que les Beatles ! Y a quand même de quoi être fier, n’empêche.

En effet ! Vous êtes rapidement arrivé dans le Top 10 des épidémies, du moins d’un point de vue de la notoriété, même si vos concurrentes, la Grippe Espagnole, la Peste Noire, la Grippe de Hong-Kong vous devancent encore largement d’un point de vue de la mortalité…

Ouais, j’sais, j’vois bien, mais j’peux pas dire que ça m’gène. Parce que, c’est plus l’époque à faire des millions de morts, c’est dépassé, ça, c’est un truc de vieux, nous les jeunes, on a compris, c’est les réseaux qui font le biz’, vaut mieux tuer moins et être présent partout que l’inverse, pour faire flipper plus. C’est ce que dit Ebola, et lui, rien à dire, c’est un cador de la comm’, il m’a bien inspiré en fait…

Et les réactions de vos fans ? Comment les analysez-vous ?

Ouais, ça, c’est de la balle, moi, j’adore ! Rien qu’en six mois, avec leur aide, j’ai foutu un bon gros caillon dans le monde et c’est pas près de s’arrêter, j’suis un punk, qu’est-ce que vous voulez, plus c’est le merdier, plus ça m’plait. Alors quand mes potes ils disent tout et son contraire à propos de moi, que je vais me tirer en juillet ou que je suis là pour des piges et des piges, je kiffe, ça fait du buzz, c’est cool !

Alors, abordons vos projets, cher Covid…

Mes projets, mes projets, j’sais pas trop, moi, c’est encore un peu tôt pour en causer, c’est pas que je sois superstitieux ou autre, pas du tout, même, mais c’est que j’attends de voir si j’irais pas essayer de pousser un peu au cul les filiales africaines, cet été, juste histoire de voir du pays. C’est pas que j’aime pas l’Europe, ça serait pas poli de ma part, vu comment elle m’a bien reçu et tout et tout, mais si on voyage pas quand on est jeune, ça vaut pas le coup d’être jeune, hein ?

Et le vaccin ?

Le vaccin ? Quel vaccin ? J’l’attends, celui-là, il a qu’à venir, moi, j’suis prêt à le r’cevoir, je vais p’t-être même demander à Juliette Binoche et à Michelle Rivasi d’être dans le comité d’accueil avec moi, on va bien se marrer. Le vaccin, j’t’en foutrais, moi…

Désolé, je ne voulais pas être désagréable…

Nan, ça va, c’est pas grave, mais comme tout le monde me casse les noix avec, forcément, ça agace. Bon, je vous laisse, j’ai un interview télé, là.

Ah, oui, je vois. Le 20h de TF1, je présume ?

Ben nan, j’vais chez Hanouna, on va se marrer, il me comprend, lui, c’est aussi un virus dans son genre.

Merci, Covid-19

De rien !

Par Naqdimon Weil

Par Naqdimon Weil

Naqdimon Weil est rédacteur. Il est aussi chroniqueur. Il est surtout social-démocrate universaliste, laïcard et sioniste. Il est gravement quinquagénaire et profondément provincial. Et, évidemment, il est dans le Coq.
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